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jeudi 3 décembre 2020

LETTRE OUVERTE SUR LES PROSPECTIVES DE LA FUTUR PAC

 
Lettre ouverte à : 

Monsieur Emmanuel MACRON, président de la République                                                            Monsieur Jean CASTEX, Premier ministre                                                                                      Monsieur Jean-Yves LE DRIAN, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères                          Monsieur Julien DENORMANDIE, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation                        Monsieur Clément BEAUNE, secrétaire d’État chargé des Affaires européennes                        Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs les sénateurs,                                    Mesdames et Messieurs les députés européens, Madame Ursula VON DER LEYEN, présidente de la Commission européenne                                                                                                                      Monsieur Frans TIMMERMANS, vice-président de la Commission européenne, en charge du Green Deal                                                                                                                                                  Monsieur Janusz WOJCIECHOWSKI, commissaire européen à l'Agriculture                                    Madame Stélla KYRIAKIDES, commissaire européen à la Santé et à la sécurité alimentaire, en charge de la stratégie Farm to Fork                                                                                                              Madame Sandrine GAUDIN, secrétaire générale des Affaires européennes                                      Monsieur Philippe LÉGLISE-COSTA, représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne                                                                                                                                       Monsieur Wolfgang BURTSCHER, directeur général de la DG agriculture de la Commission européenne


Mesdames, Messieurs,

La crise sanitaire grave que nous vivons met en exergue le besoin essentiel pour l’Europe et la France de sécuriser leurs approvisionnements et donc de réfléchir aux moyens de mettre en place une véritable souveraineté alimentaire. Pendant ce temps, sans tirer de leçons de cette crise, les discussions sur la future Politique Agricole Commune (PAC) se poursuivent et la stratégie « De la ferme à la table » pour un système alimentaire équitable, sain et respectueux de l'environnement et de la biodiversité ne se voit pas corrigée.

Avec cette stratégie, la Commission européenne entend s’attaquer à toute la chaîne de transformation et de commercialisation agroalimentaire et au gaspillage alimentaire. L’agriculture devra se plier à des pratiques prétendues plus vertueuses, réduire l’utilisation des « pesticides » et des antibiotiques, et répondre à des normes de production encore plus strictes et contraignantes.

Vue sous l’angle sanitaire, la stratégie « De la ferme à la fourchette » part d’une très bonne intention puisque, comme le demande la Coordination Rurale depuis des années, cela voudrait enfin dire que les denrées alimentaires importées qui ne sont pas conformes aux normes environnementales de l’Union européenne, ne seraient plus autorisées à rentrer sur les marchés de l’Union ! Une telle ambition pourrait faire sens si une cohérence entre politique environnementale et politique commerciale était réellement recherchée. Or, difficile d’y croire quand, en pleine urgence sanitaire, l’Union européenne vient de terminer les négociations du nouveau traité de libre-échange avec le Mexique et que de nombreux autres traités se préparent en coulisses.

Des chercheurs français ont réalisé pour la commission agricole du Parlement européen une étude indiquant que si l’on voulait maintenir le niveau d’émissions de Gaz à effet de serre (GES), tout en maintenant la production et les niveaux de consommation dans l'Union et en produisant tout en bio, il faudrait soit étendre la superficie agricole totale européenne, soit augmenter les importations agricoles en provenance de pays tiers. En effet, les émissions de GES de l'agriculture biologique sont inférieures à l'hectare, mais généralement plus élevées par kilogramme de produit, par rapport à l’agriculture « conventionnelle ». Exporter nos bonnes pratiques est une bonne idée mais combien de produits agricoles et alimentaires l’Europe va-t-elle devoir importer pour compenser ce manque de production ?

L’atteinte des objectifs environnementaux couplés à celui de la souveraineté alimentaire de l’Union européenne passe donc par la définition d’un cadre réglementaire et économique capable de mettre un terme à la concurrence déloyale du libre-échange et de garantir des prix rémunérateurs aux producteurs européens.

Étant donné que les réformes passées des PAC successives n’ont jamais été évaluées a posteriori, nous nous interrogeons sur l’existence d’une évaluation européenne et nationale des effets de la mise en application de la stratégie « De la ferme à la fourchette ». Sceptiques sur l’existence d’une quelconque prospective, nous vous demandons de bien vouloir nous révéler les informations dont vous disposez à ce sujet. Notre inquiétude se nourrit de deux informations qui nous sont parvenues et qui n’ont évidemment pas pu vous échapper.

D’une part, dans son rapport annuel sur la performance du budget de l’Union européenne en 2019, la Cour des comptes européenne estime que la Commission fournit « peu d’informations sur les résultats et l’impact de la PAC » et qu’elle en fait une lecture « trop positive », fondée sur des indicateurs qui mesurent le « niveau d’absorption » des fonds plutôt que l’efficacité réelle de la politique mise en place.

D’autre part, l’USDA (Département américain de l’Agriculture) a effectué une série de simulations sur l’application de la stratégie « De la ferme à la fourchette » pour en examiner les implications en termes de productions, de marchés, de prix et de revenus pour les consommateurs et agriculteurs européens. Au-delà de cette prospective, l’USDA a même proposé différents scénarios et étudié les incidences qu’aurait la mise en œuvre de cette stratégie au niveau mondial. Dans tous ces scénarios, les Américains constatent que les réductions d'intrants proposées affectent les revenus des agriculteurs de l'Union européenne en réduisant leur production agricole de 7 à 12 % et en diminuant leur compétitivité sur les marchés intérieurs et d'exportation. Les revenus des agriculteurs diminueraient de 16 % !

De plus, conjointement, ils prévoient que l'adoption de ces stratégies aurait des impacts au-delà de l'Union, faisant grimper les prix alimentaires mondiaux de 9 % (en cas d’adoption dans l'UE uniquement) à 89 % (en cas d’adoption mondiale). Cela affecterait très négativement les budgets des consommateurs mais augmenterait aussi dramatiquement le nombre de personnes en situation d'insécurité alimentaire dans les régions les plus vulnérables du monde. Selon l’USDA, cela risque en effet de faire tomber dans l’insécurité alimentaire entre 22 millions (en cas d’adoption par l’UE uniquement) et 185 millions de personnes (en cas d’adoption mondiale).

C’est pourquoi, confrontés à de si sombres prospectives, nous vous demandons instamment de nous informer et de nous rassurer par vos propres études ou, si elles n’existent pas, de les réaliser en urgence pour ne pas entraîner notre pays et l’Union européenne dans un chaos irréversible et d’un coût exorbitant que ce soit sur le plan sanitaire, social, économique ou géopolitique.

Tout comme nous rendons ouverte cette lettre que nous vous adressons, nous ouvrirons également vos réponses à l’ensemble de nos adhérents et sympathisants.

Certain de l’attention que vous porterez à notre courrier, je vous prie d’agréer, Mesdames, Messieurs, l’expression de ma haute considération.

                                                                                        


                                                                          Bernard Lannes

                                                                        Président national

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